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Toutes les actualitésDes crues exceptionnelles en Asie du Sud-Est
À peine sortie de la crise sanitaire provoquée par le coronavirus, la Chine a dû affronter une nouvelle catastrophe, durant la saison des pluies. Des précipitations, d’une ampleur exceptionnelle et à répétition, ont provoqué crues et inondations dans les bassins du Yangtsé (le Fleuve bleu) et du Fleuve Jaune. D’autres pays en Asie ont été touchés.
Dès le mois de juin, des pluies torrentielles se sont abattues dans le sud-ouest de la Chine, avant de se diffuser vers l’est. Le ministère des Ressources en eau du pays indiquait qu’à mi-juillet, 433 rivières avaient atteint des niveaux dangereux et 53 leur plus haut niveau historique, provoquant de nombreuses inondations.
Mi-août, c’était au tour de Pékin d’être en état d’alerte et de fermer ses aéroports, parcs et lignes de transport en commun. D’autres grandes villes étaient touchées, comme Tianjin et les régions du Hebei et du Sichuan.
Encore à la fin août, la situation hydrologique dans le bassin du Fleuve Jaune était tendue et la Commission de Conservation du Fleuve Jaune annonçait la sixième crue de l‘année. Les autorités chinoises évoquent la plus forte saison de pluies depuis celle de 1998, qui avait fait près de 3 500 morts et laissé 15 millions d’habitants sans foyer.
Selon un premier bilan, 55 millions de personnes ont été sinistrées dans 27 provinces et près de 4 millions de personnes déplacées ou évacuées. Grâce au système de veille et d’évacuation rapide des habitants mis en place, le bilan humain est contenu, même si l’on décompte un plus de 200 personnes décédées ou portées disparues. Le coût économique (dommages matériels, perte de production agricole…) est pour sa part, colossal, estimé à 22 milliards d’euros.
Des barrages mis à l’épreuve
Les ouvrages hydroélectriques ont été mis à rude épreuve par la montée du niveau des eaux et les forts débits. Au barrage des Trois Gorges (plus importante centrale hydroélectrique au monde en termes de puissance installée), les vannes anti-crues ont été ouvertes pour laisser passer l’eau d’un débit de 75 000 m3/s ! Le niveau de l’eau dans la retenue a atteint jusqu’à 165 mètres le 21 août au matin (sa hauteur maximale étant de 175 mètres). 40 000 personnes en aval du barrage ont dû être évacuées. Les inspections de la structure se sont multipliées, face à l’apparition d’infiltrations et de légères déformations.
Ailleurs, dans la province de l’Anhui, un barrage sur la rivière Chu a été dynamité fin juillet pour garantir la sécurité des riverains. Selon le ministère des Situations d’urgence, 30 milliards de mètres cubes ont été contenus par les différents barrages et réservoirs sur le Yangtsé (le plus long fleuve de Chine avec 6 300 km) de juin à début août, ce qui aurait permis d’atténuer les inondations en aval, en particulier dans la métropole de Shanghai, à l’est du pays.
Un signal d’alarme du changement climatique
La Chine n’est pas le seul pays à affronter des conditions météorologiques sévères cette année. La majeure partie des pays d’Asie du Sud Est font face, comme tous les ans, à la mousson mais aussi à des tempêtes tropicales.
La Corée du Sud a ainsi connu une situation exceptionnelle, avec plus de 50 jours consécutifs de pluie. En Inde, les pluies de mousson ont été meurtrières : près de 800 tués au moins officiellement. Le Népal et le Bangladesh ont aussi enregistré des niveaux de pluie très élevés.
Ces phénomènes extrêmes sont considérés par les organisations environnementales comme un signal d’alarme des impacts du changement climatique. Les dégâts sont sûrement exacerbés par l’artificialisation des sols provoquée par la forte urbanisation, qui ne permet pas un bon ruissellement des eaux en cas de précipitations. Le gouvernement chinois s’est déjà saisi de ce problème, en développant une nouvelle forme d’urbanisme depuis 1994, basé sur le concept de ville éponge. En rendant à la ville sa perméabilité, l’objectif est d’améliorer la résilience urbaine face aux inondations torrentielles et de sécuriser l’approvisionnement en eau des métropoles. Le gouvernement chinois prévoit que d’ici 2030, 80 % des aires urbaines chinoises devront être capables d’absorber et réutiliser 70 % des eaux de pluie qui les touchent. Pour cela, 12 milliards de dollars de subventions publiques et d’investissements privés sont débloqués.
De son côté, la Mekong River Commission vient d’annoncer un partenariat avec Facebook pour lancer un dispositif d’alerte rapide des populations riveraines en cas d’inondation et de suivi des sécheresses pour le Bas-Mékong, qui couvre le Cambodge, le Laos, la Thaïlande et le Vietnam. Cette région est de plus en plus vulnérable aux sécheresses et aux inondations,
sous les effets des évolutions climatiques (+0,8°C d’augmentation de la température moyenne d’ici 2030). 22 stations hydrologiques ont été installées pour surveiller et collecter les données sur les niveaux d’eau du fleuve et les précipitations qui viendront alimenter le système de prévision. Élaboré pour le public, cet outil de prévision et d’alerte est aussi destiné aux gouvernements, afin de mieux gérer les risques.