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Le fleuve Paraná à son plus bas niveau depuis 70 ans

 Un fleuve aux allures de désert… Le Paraná, deuxième plus grand fleuve d’Amérique latine après l’Amazone, souffre d’un étiage sévère et ses canaux secondaires se sont réduits, voire complètement asséchés, du Brésil en Argentine. Fin juillet, le gouvernement argentin déclarait l’état d’urgence hydrique pour 180 jours tandis qu’au Brésil survient une crise énergétique.

 

Une sécheresse à répétition

 

2019 – © NASA Earth Observatory
2020 – © NASA Earth Observatory

La saison sèche s’était achevée en octobre dernier en Amérique du Sud par un bilan environnemental lourd, marquée par des incendies au Brésil et une baisse historique des niveaux d’eau dans les fleuves Paraná ou Paraguay (lire notre article paru le 27/11/2020). Cet état de sécheresse semble devenir durable et 2021 marque une nouvelle dégradation de la situation des milieux aquatiques. Le fleuve Paraná, qui prend sa source au Brésil et court sur 4 800 km, a atteint son plus bas niveau depuis 1944.

 

Les basses eaux sont certes une variabilité naturelle dans cette région mais le déficit pluviométrique observé depuis plusieurs semaines est sûrement exacerbé par les activités humaines, entre déforestation, transformation de l’usage des sols par l’élevage intensif et l’urbanisation et disparition des zones humides, outre le réchauffement global. En 2020, l’une des grandes zones humides du monde au Brésil avait été ravagée par les incendies.

 

Des barrages à sec

 

Conséquence de cette faible pluviométrie : le débit moyen du Paraná de 17 000 m3/s est tombé à 6 200 m3/s, juste au-dessus du minimum historique (5 800 m3/s) enregistré en 1944. La centrale hydroélectrique d’Itaipu, la plus productive au monde, ne fonctionne qu’à 50 % de sa capacité. Au barrage de Yacyreta, entre Argentine et Paraguay, le débit d’eau enregistré en juin est le plus faible depuis mai 1914 et la production a été réduite de moitié. Les chutes d’Iguaçu, haut-lieu touristique et de biodiversité, ont diminué en volume de 80 %.

Dans l’ensemble du bassin du fleuve Paraná et de ses affluents, qui alimente 130 barrages, les précipitations sont inférieures à la moyenne mensuelle quasiment systématiquement depuis octobre 2019. Fortement dépendants de l’hydroélectricité, les pays traversés par le Rio Paraná doivent trouver des solutions d’urgence. Au Brésil, le président Jair Bolsanaro a appelé début septembre la population à « éteindre les lumières » pour économiser l’électricité, tout en incitant à produire à partir d’autres sources d’énergie (centrales biomasse et thermiques) voire à importer de l’électricité. Les prix flambent et la facture pour les ménages a augmenté de 13 % depuis le début de l’année.

Un impact économique majeur

 

© AFP – Marcelo Manera

Les impacts sur la navigation sont évidemment désastreux, 80 % des exportations agricoles d’Argentine transitant par exemple sur le fleuve vers l’Atlantique. La bourse de commerce de Rosario, selon les informations que nous a communiquées Alfredo Sese[1], dresse un état chiffré inquiétant : le secteur agro-industriel aurait déjà perdu depuis le début de l’année 315 millions de dollars US en raison du ralentissement des exportations de céréales (les opérateurs devant réduire le chargement des barges pour éviter qu’elles s’échouent, ou recourir en partie au transport par voie terrestre, ce qui augmente de plus de 20 % le coût).

Au Brésil, les prévisions tablent sur une production de café en baisse de 25 %. Les autres cultures importantes pour l’alimentation de la population locale, comme le maïs ou la canne à sucre, seront également moindres.

Les coupures d’eau se multiplient dans les villes. Au Brésil, certaines villes de taille moyenne comme Itu, dans l’Etat de Sao Paulo, ont déjà procédé à des rationnements un jour sur deux pour certains quartiers. L’impact écologique est tout aussi important, les poissons voyant leurs habitats se réduire ou disparaître. Les lagunes et bras du fleuves, où les poissons frayent, sont déconnectés du cours principal par d’énormes bancs de sable et la teneur en sel de l’eau augmente. La pêche, source de subsistance et de revenus pour des milliers de famille, est plus difficile, voire interdite.

Cette crise intervient dans un contexte économique déjà fragilisé en Amérique du Sud par la pandémie de Covid-19 et la poussée de l’inflation.

[1] Alfredo Sese est un membre expert ressource au sein d’IAGF. Il est actuellement Secrétaire technique des Transports et de l’Infrastructure à la Bourse de Commerce de Rosario.

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