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Toutes les actualitésLa mer Morte menacée
Le point émergé le plus bas de la surface du globe, la mer Morte, est menacée de disparition. La hausse des températures et les pompages dans le Jourdain sont à l’origine de ce phénomène qui pourrait, selon des scientifiques, créer la prochaine catastrophe écologique.
La mer Morte est considérée comme un trésor de la nature. Non en raison de sa richesse écologique : seuls quelques micro-organismes comme du plancton ou des bactéries réussissent à y vivre, une spécificité qui explique son nom. Ce sont ses caractéristiques hors normes qui la rendent exceptionnelle : une salinité très élevée – une teneur de plus de 27 % alors que le taux moyen des océans et mers est de 2 à 4% – et un niveau 430 mètres en dessous de celui de la mer. Dans un environnement de montagnes arides, la mer Morte, qui n’est finalement qu’un lac salé aux eaux bleu turquoise, fascine depuis toujours et apporte ses bienfaits thérapeutiques. Étendue sur 51 kilomètres de long et 18 kilomètres de large, elle est partagée entre Israël, la Jordanie et la Cisjordanie.
Ce trésor est en danger : ces cinquante dernières années, elle a perdu 28 % de sa profondeur et le tiers de sa superficie. Son niveau baisse inexorablement, avec une moyenne de 1,45 mètre par an. La mer Morte est-elle menacée de disparition ?
Un tournant en 1960
Durant des millénaires, la mer Morte était remplie d’eau douce par le fleuve Jourdain, via le lac de Tibériade. En 1960, l’État d’Israël est en plein développement et décide de créer une nouvelle voie d’eau afin de cultiver les déserts. L’écoulement naturel du Jourdain est alors empêché par un barrage, construit au sud du lac de Tibériade. À la même période, dans la ville jordanienne d’Amman, un canal est construit dans le but d’exploiter les sels de la mer Morte, très prisés. Cette infrastructure a pour conséquence d’accélérer l’évaporation d’eau, ce qui participe largement à l’abaissement de son niveau. L’équilibre entre l’approvisionnement en eau douce par le Jourdain et l’évaporation naturelle de l’eau est rompu. La construction de canaux de dérivation se poursuivra pour irriguer les cultures.
La surexploitation de la ressource en eau est la cause de ce nouveau désert de sable qui se forme actuellement. Le Jourdain étant passé d’un débit de 1 300 m3 /s dans les années soixante à 300 m3 /s au début des années 2000. Cela a pour conséquence de former des cratères gigantesques surnommés « dolines » . En Israël et en Jordanie, on en dénombre pas moins de 6 000. Ces dépressions circulaires peuvent atteindre jusqu’à plusieurs kilomètres de diamètre. Elles sont formées par l’infiltration de l’eau dans les sols, ce qui crée des cavités souterraines. Le risque est alors l’érosion et l’effondrement des sols.
Un projet pour sauver la mer Morte ?
Fin 2006, la Banque Mondiale et l’Agence Française de Développement (AFD) ont assisté Israël et la Jordanie pour la conception d’un projet colossal : relier la mer Morte à la mer Rouge par une canalisation souterraine de 180 kilomètres de long. Un accord a été signé en 2013 entre les pays, il prévoit notamment une usine de dessalement au nord du port d’Aqaba pour obtenir de l’eau potable, rare dans la région. Mais le coût élevé du projet, évalué à 10 milliards de dollars, et la controverse écologique qu’il a fait naître, freinent sa mise en œuvre. Aujourd’hui, des alternatives plus simples, mais sûrement insuffisantes à elles seules, sont proposées, comme l’interdiction de construction sur les zones côtières pour la Jordanie. Israël envisage, de son côté, de taxer les industries minières qui pompent l’eau précieuse de la mer Morte.
Les eaux de la mer Morte se trouvent de plus en plus menacées par les impacts de l’abaissement de son niveau : l’eau est plus rare, la salinité augmente et risque d’atteindre un taux toxique. Déjà, une eau verte, corrosive et acide, se développe.
Si la mer Morte a besoin du Jourdain, le Jourdain, lui, a besoin du lac Tibériade, dans lequel il prend sa source. Or, le lac a été touché par des baisses drastiques de son niveau ces dernières années, enclenchant un cercle vicieux entre les trois systèmes.
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